"Boire ou conduire, il faut choisir". Ce célèbre slogan des années 80 reste plus que jamais d'actualité, puisque d'après les statistiques de la Prévention routière, l'alcool était en 2013 la cause principale de presque 1 accident mortel sur 3... Au-delà des sanctions pénales, connaissez-vous les effets de l'alcool sur votre assurance auto ?
Cas n° 1 : vous êtes responsable d’un accident en état d’ivresse
Vous êtes responsable d’un accident automobile, et un alcootest révèle que vous étiez sous l’emprise d’alcool, au-delà des limites autorisées par la loi. Outre les sanctions pénales prévues (voir paragraphe précédent), quelles sont les conséquences au regard de votre assurance ?
- L’indemnisation des victimes
En tant que conducteur assuré, vous avez forcément souscrit une assurance en responsabilité civile(communément appelée assurance au tiers), qui est la garantie minimum obligatoire pour tout conducteur depuis 1958.
Cette assurance en responsabilité civile est destinée à couvrir tous les dommages que vous pourriez occasionner à des tiers, qu'il s'agisse d'autres conducteurs, de leurs passagers ou des vôtres, ou encore des piétons, cyclistes... Ces dommages peuvent être d’ordre matériel et/ou corporel.
Même si vous êtes responsable d’un accident sous l’emprise de l’alcool, votre assureur ne peut pas refuser d’indemniser les victimes. En effet, l’article L211-6 du Code des assurances dispose clairement que « est réputée non écrite toute clause stipulant la déchéance de garantie en cas de condamnation pour conduite en état d’ivresse ou sous l’emprise d’un état alcoolique ou pour conduite après usage de substances ou plantes classées stupéfiants ».
En effet, il serait injuste que des victimes d’accidents ne soient pas indemnisées, au motif que le conducteur responsable a commis une faute aggravée par l'absorption d'alcool. C’est dans cet esprit qu’a été élaborée la loi du 5 juillet 1985, appelée loi Badinter, qui est le socle de l’indemnisation des victimes d’accidents de la route impliquant des véhicules terrestres à moteur.
- Votre indemnisation en tant que conducteur responsable
Il en va tout autrement de votre propre indemnisation, si vous êtes responsable d’un accident sous l’emprise de l’alcool ou de produits stupéfiants. En effet, l’article L211-6 du Code des assurances précité ne s’applique qu’à votre seule responsabilité civile, envers les tiers victimes de votre conduite.
Pour le reste, il faut se référer aux conditions de votre contrat. Le plus souvent, celui-ci prévoit des clauses d’exclusion relatives à la consommation d’alcool et/ou de produits stupéfiants, en cas d’accident responsable.
Ces clauses auront pour effet d’exclure l’indemnisation par votre assureur de vos propres dommages matériels (si vous avez souscrit une assurance tous risques) et de vos dommages corporels (si vous avez souscrit une garantie individuelle conducteur). La garantie protection juridique n’interviendra pas non plus. Plus largement, la conduite en état d’ivresse exclut généralement toutes les garanties facultatives (garantie dommage collision, etc.).
Cependant pour être valables, l’article L113-1 du Code des assurances exige que ces exclusions soient stipulées clairement et en caractères très apparents dans les conditions du contrat que vous avez signé.
Cas n° 2 : vous êtes victime d’un accident, mais en état d’ivresse
Dans tous les cas où une autorité (police nationale ou gendarmerie) se rend sur les lieux d’un accident, un contrôle d’alcoolémie est systématiquement effectué.
Si vous êtes impliqué dans un accident dont vous n’êtes pas responsable, mais que vous conduisiez sous l’emprise de l’alcool ou d’un produit stupéfiant, l’assurance du conducteur responsable ne pourra pas refuser de vous indemniser. Vous bénéficiez à votre tour des dispositions de l’article L211-6 du Code des assurances.
Cela suppose évidemment que la responsabilité de l’accident repose entièrement sur l’autre conducteur, indépendamment de votre propre imprégnation en alcool. Les tribunaux ont longtemps hésité sur ce point. Mais depuis 2007, la jurisprudence a admis que l’état d’ébriété de la victime ne devait pas exclure son indemnisation. A condition toutefois qu’aucun lien de cause à effet ne puisse être démontré entre l’alcoolémie de la victime conductrice, et une faute de conduite commise par elle, qui serait à l'origine de l’accident.
Pour résumer :
La conduite en état d’ivresse est en elle-même constitutive d’une faute pénale passible de sanctions.
MAIS elle ne peut pas vous être opposée par un assureur pour refuser votre indemnisation, s’il n’est pas démontré que vous avez par ailleurs commis une faute de conduite ayant causé l’accident dont vous êtes victime.
Quels risques de résiliation de votre assurance ?
Au-delà de l’indemnisation des dommages matériels et/ou corporels, il faut envisager l’attitude de votre assureur, à la suite d’un accident sous l’emprise de l’alcool ou de produits stupéfiants.
Que vous soyez reconnu responsable ou non de l’accident, votre assureur pourra décider soit de :
majorer la prime de votre contrat d’assurance auto, dans la limite de 150%, ou de 400% si vous vous rendez coupable d’infractions multiples (par exemple un délit de fuite)
résilier unilatéralement votre contrat, en respectant un délai de préavis d’un mois. Cette possibilité est expressément prévue par l'article A 211-1-2 du Code des assurances. Si votre assureur résilie votre contrat pour ce motif, sachez qu'il deviendra alors beaucoup plus difficile de trouver une compagnie qui acceptera de vous assurer.
Au-delà de l'assurance, les risques civils et pénaux
Songez qu'en dehors des risques matériels pour les véhicules, un accident peut entraîner d'importants dommages corporels, à la fois pour vous, pour les autres conducteurs, les passagers et autres éventuelles victimes (piétons, cyclistes...).
Ces dommages peuvent avoir de lourdes répercussions (incapacité de travail, invalidité, décès), dont vous pourriez avoir à supporter les conséquences financières pendant de longues années...
Indépendamment de la question de l'indemnisation par les assurances, vous pouvez être condamné à des peines pénales(suspension ou retrait de permis, amende, voire emprisonnement) ou à des réparations civiles (dommages et intérêts), réclamées par les victimes et par votre assureur, si ce dernier se retourne contre vous.
Une nouvelle voie de recours pour les conducteurs contrôlés pour alcoolémie
Le Conseil d’État a reconnu l’illégalité d’une suspension administrative du permis de conduire suite à un dépistage avec un éthylomètre, au motif de la non prise en compte de la marge d’erreur technique. Désormais l’automobiliste contrôlé positif a la possibilité de faire valoir la marge d’erreur technique de l’éthylomètre devant le tribunal administratif.
Ces sanctions seront prononcées en fonction des préjudices subis, et jugées selon la gravité des fautes commises. Elles le seront d'autant plus sévèrement qu'un accident responsable sous l'emprise de l'alcool est considéré comme une faute aggravée...
Prévention : Campagne de la Prévention routière contre l'alcool au volant
Lancement d'un site Internet dédié : plus de 27 000 rêves ajoutés sur le site en 1 semaine
Création du hashtag #Avantdemourir : 13 827 tweets dans les premières 48h
Zoom sur
Faut-il déclarer un contrôle d'alcoolémie positif à son assureur ?
Si vous faites l’objet d’un simple contrôle d’alcoolémie en dehors de tout accident, et que ce contrôle révèle un taux d’alcool supérieur aux limites autorisées par la loi, vous êtes bien sûr passible des peines prévues par le Code de la route :
De 0,5 à 0,8g/l dans le sang (0,25 à 0,39 mg/l d’air expiré) : amende forfaitaire de 135 euros (90 si vous payez sous 3 jours), et un retrait de 6 points sur votre permis
Au-delà de 0,8g/l, l’infraction devient un délit jugé par le Tribunal correctionnel, qui pourra vous infliger une amende pouvant aller jusqu’à 4500 euros, l'immobilisation du véhicule et une suspension de permis jusqu’à 3 ans, voire une annulation du permis. Dans les cas les plus graves, une peine pouvant aller jusqu’à 2 ans d’emprisonnement peut être prononcée.
Pensez à informer votre assureur !
Au titre de votre contrat, si vous subissez une sanction consistant en une suspension ou une annulation de permis, vous êtes tenu d’en informer votre assureur. Il y a en effet une aggravation du risque.
Selon les cas, l’assureur pourra soit décider de ne rien faire, soit décider de majorer votre prime d’assurance. Il pourra aussi purement et simplement résilier unilatéralement votre contrat, à condition toutefois que ce droit soit mentionné dans votre contrat.
Si vous ne remplissez pas votre obligation d’information à l’égard de votre assureur, et que celui-ci vient à apprendre les sanctions dont vous avez fait l’objet, il pourra alors dénoncer votre contrat de plein droit, sans préavis. Sa décision devra toutefois vous être notifiée par courrier recommandé, et deviendra effective 10 jours après son envoi.